Introduction

Je ne parlerai que de ce que je connais, de l'unité fermée de mon père. Il y a séjourné 14 mois, 14 mois de trop. Je n'ai pu le récupérer car ses fils ont mis en place une tutrice pour m'en empêcher. L'un était à 3h de route, l'autre à 4h, ils ne voyaient donc rien, et surtout ne voulaient rien savoir de ce qu'il se passait dans cet ehpad. C'est, malheureusement, la majorité des familles des malades des unités fermées.

A noter que cet ehpad était un ehpad PILOTE et que le 'médecin' coordonnateur Heddi B était aussi président de l'association des gériatres en établissement de l'agglomération de cette ville, président de l'association gérontologie de ce département et membre du bureau de la fédération éthique de cette même agglomération. C'est non sans intérêt...

Ils oseront peut-être vous dire, comme ils me l'ont dit, que dans une unité fermée il existe un environnement bienveillant. Faux, il est anxiogène. Un exemple parmi d'autres : un jour mon père m'a fait un tas de signes au travers de la vitre du couloir pour m'avertir qu'il ne fallait pas que je rentre dans l'unité, pour me protéger m'a t-il dit. Je suis quand même rentrée et je me suis bien fait enguirlandée. Tétanisé et vissé sur son siège pendant plusieurs heures, il n'avait pas le droit de se lever disait-il. Une malade hurlait...j'y reviendrai plus tard. Il était dans la terreur des autres, peur de représailles, ce qui n'était jamais arrivé à la maison.

Je tiens à préciser qu'il y avaient quelques filles compétentes dans cette unité, qui me disaient 'Battez vous'. Un sentiment d'avoir des alliées qui me permettaient de me sentir moins seule, mais qui ne pouvaient m'aider réellement puisqu'elles subissaient, elles aussi, le système. La psychorigidité de l'ehpad, du corps médical (infirmières et médecin coordonnateur), leur manque de connaissance de la maladie, et surtout leur...'philosophie'. Vous lirez ce paragraphe plus tard.

L'ehpad devrait entendre l'aidant, ce qu'il sait de son proche, ce qu'il connaît de la maladie sur son proche (chaque malade est différent), plutôt que de l'écarter, le mépriser et lui mentir.

Le malade a, comme l'ehpad l'appelle, une période 'd'adaptation' à traverser, de 2 à 6 mois, à son entrée dans l'ehpad. Période plus ou moins terrible suivant le malade : agressivité, panique, colère, angoisse, stress, peur, terreur, désir de suicide, etc...
Mais à mon humble avis, cette période qu'ils appellent, d'adaptation, n'est que le temps nécessaire qu'il faut au malade pour se résigner, et pour certains, à en perdre la raison, que je dissocie bien de la maladie. Il faut donc être très présent les premières semaines (visite journalière) pour qu'il ne ressente pas, en plus, l'abandon. Ensuite, visite régulière, tous les 2 ou 3 jours.

Comment un dément peut-il perdre la raison alors que nous aurions tendance à dire qu'il l'a déjà perdue ? Une sensation qu'il y a la maladie d'un côté, qui fait dysfonctionner qui fait déformer les faits réels, et la perte de la raison de l'autre, réaction bien humaine d'homme sain d'esprit, qui est une conséquence de faits bien réels : l'enfermement, la solitude, les souffrances, l'abandon de tous et la sortie les pieds devant. Je dis abandonné de tous car la famille n'est généralement pas franchement présente dans ces unités fermées.
Un très faible nombre s'y sente mieux qu'à la maison et pour qui cette période d'adaptation n'existe pour ainsi dire pas.

J'ai l'impression que le système n'a pas su quoi faire de ses déments, il a cru solutionner le problème en les mettant dans les maisons de retraite médicalisées qui étaient exclusivement des 'services' de gériatrie....et elles le sont restées. Ce n'est pas un code à une porte et des couloirs pour déambuler (quand il y en a) qui transforment un lieu de gériatrie en un lieu de psychogériatrie. L'ignorance, la non formation sur la maladie du personnel soignant à tous les niveaux hiérarchiques, font froid dans le dos.